vendredi 14 mars 2014

Grattons le bobo


Ayant été bloqué dans le Bas-Saint-Laurent par la dernière tempête, j’ai eu l’occasion de voir à l’œuvre plusieurs grattes. Rappelons que, avant son dernier lifting, le Grand Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF) donnait ce mot comme « quasi-synonyme », dans la « langue courante », du terme déneigeuse. Il est aujourd’hui présenté comme « terme à usage restreint », avec les marques « Québec » et « langue courante ». Au fond, un changement cosmétique.


Il est intéressant de comparer sur ce point le GDT avec le dictionnaire Franqus-Usito : ce dernier présente gratte comme un mot « familier » au Québec (voir mon billet du 29 décembre 2012).


Cela amène à poser les questions suivantes : pour le GDT, la langue courante est-elle en fait un registre de langue, le registre familier ? Et que viennent alors faire dans un dictionnaire technique (ce qu’est en principe un dictionnaire terminologique) des termes familiers ? Ne méritent-ils pas au mieux une mention rapide dans une note ?


Bref, trois ans après le manifeste des anciens terminologues de l'OQLF, on doit encore poser la question : le GDT, est-ce de la lexicographie ou est-ce de la terminologie ?


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Au moment de mettre en ligne mon dernier texte, je m’aperçois que, sûrement grâce à la dernière tempête, mon billet sur lame de neige est celui qui a été le plus lu cette semaine.



1 commentaire:

  1. On confond effectivement plusieurs concepts dans le GDT : « langue » et « registre de langue », « langue » et « usage », « courant » et « familier », etc.

    En linguistique, l’expression « langue courante » qualifie l’usage courant, qui correspond aux mots, expressions ou termes, compris et utilisés par l’ensemble des locuteurs d’une collectivité sociolinguistique. On a donc pas à marquer l’usage courant, puisqu’il constitue la langue usuelle de la collectivité. C’est ce qui est convenu en lexicographie. Dans les dictionnaires usuels, on ajoute parfois une note, pour indiquer, par exemple, qu’un terme scientifique ou didactique est inusité dans la langue courante.

    Ce sont les mots, les expressions ou les termes associés à des registres de langue qui sont habituellement mis en évidence par des marques d’usage (exemples : didactique, savant, familier, vulgaire, scientifique, etc.) dans les dictionnaires. Ces marques servent justement à caractériser des emplois qui ne sont pas d’un usage courant, mais bien d’un usage restreint. L’usage familier ne relève donc pas de la langue courante, pas plus que l’usage savant, ou vulgaire.

    Il y a donc une contradiction bien gênante dans le GDT. En effet, comment un terme d’usage courant ou dit « de langue courante » (« gratte », « charrue », « charrue à neige ») peut-il être classé sous la catégorie « ! termes à usage restreint » ? Et pour ces exemples, aucune note ne peut orienter l’usage.

    Sans risque de se tromper, on peut conclure qu’il n’y a pas eu de réflexion sur les registres de langue à l’OQLF et que cette lacune importante a eu une conséquence très grave : l’absence, dans le GDT, d’un système de marques cohérent et surtout, qui soit en adéquation avec une théorie sociolinguistique, ou, au moins, avec un cadre méthodologique éprouvé en terminologie.

    Où sont les linguistes dans la salle ?

    Christiane Loubier

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