mercredi 4 mai 2016

Francisation de façade


Hier après-midi, l’édition électronique du Devoir nous apprenait que le gouvernement québécois avait finalement pris une décision sur la question des marques de commerces en anglais et qu’il allait intervenir non en modifiant la Charte de la langue française mais l’un de ses règlements. L’article de la version papier du Devoir de ce matin apporte des précisions. Extraits commentés de cet article :


Les Toys “R” Us, Starbucks, Best Buy et autres Burger King du Québec n’auront pas à traduire leur image de marque ni à y apposer un générique tel que « restaurant » ou « café », a confirmé le gouvernement, mardi. Tout au plus, ces multinationales devront assurer « une présence suffisante » du français sur leur façade, qui pourra prendre la forme tantôt d’un slogan, tantôt d’un descriptif ou d’une autre mention située sur la devanture, mais pas nécessairement au même endroit que le logo.


Comme je l’avais déjà expliqué dans ce blog en me basant sur l’avis produit en 2000 par le Conseil de la langue française, l’exigence de l’Office québécois de la langue française d’obliger les entreprises à ajouter un générique ou un descriptif n’avait pas d’assise juridique. Le Conseil recommandait plutôt de prendre des mesures pour que les entreprises accroissent la présence du français sur leur façade lorsqu’elles affichent une marque de commerce anglaise.

Le Conseil du patronat a accueilli favorablement la mesure, qui laisse suffisamment de temps et de latitude aux entreprises, selon le président Yves-Thomas Dorval. 


L’accueil favorable du Conseil du patronat suffit à prouver que la décision prise par le gouvernement libéral ne bousculera rien.

À défaut de pouvoir forcer les entreprises à franciser leur image de marque comme l’ont fait volontairement Shoppers Drug Mart (Pharmaprix) et Staples (Bureau en gros) au fil des années, Québec français aurait souhaité que le gouvernement oblige la présence d’un descriptif français « collé » au nom de marque, a expliqué son porte-parole Éric Bouchard.


Il y a quelques années, en effet, l’Office québécois de la langue française a essayé de faire croire que les commerçants étaient tenus d’ajouter un descriptif en français à leur marque de commerce anglaise (cliquer ici pour avoir accès à la liste des billets que j’ai publiés sur ce thème). L’Office a été débouté en Cour d’appel.


On modifiera finalement le règlement sur la langue du commerce plutôt que la loi 101, en évoquant notamment le fait que les marques de commerce sont de compétence fédérale.


La dernière phrase n’est que partiellement vraie : les marques de commerce sont effectivement de compétence fédérale. Mais les entreprises qui choisissent de déposer une version française de leur marque de commerce sont tenues de l’utiliser au Québec – on ne propose pas au gouvernement fédéral d’inciter les entreprises à déposer une marque française, ce qui aurait été la moindre des choses. Qui plus est, on omet de mentionner un élément d’importance : les marques de commerce sont protégées par des accords internationaux signés par le Canada. C’est pourquoi le gouvernement américain ne pourrait pas, par exemple, obliger le Cirque du Soleil à s’appeler Sun Circus lorsqu’il donne des spectacles aux États-Unis.


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Attendons de voir le texte du règlement. Il pourrait être plus décevant pour les défenseurs du français au Québec que ce que donne à entendre la mise en scène médiatique d’hier.



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