mercredi 11 janvier 2017

Les mots de l’année 2016


Cette année encore, l’équipe des dictionnaires Oxford a préparé une liste des dix mots qui ont marqué l’année 2016. J’ai mentionné dans le billet précédent le mot qui a été désigné mot de l’année 2016 : post-truth. Le mot, apparu il y a une décennie, est devenu à la mode lors de l'élection présidentielle américaine.




Voici un tableau présentant les neuf autres mots et les équivalents proposés par le Grand Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF) pour les rendre en français – lorsque le mot a été traité par les terminologues de l’OQLF, ce qui ne fut le cas que de deux mots sur dix en 2016. La situation s’est donc détériorée par rapport à celle de l’année précédente (voir mon billet « Les mots de l’année 2015 »).

Mot anglais (ou étranger)
Définition donnée par l’équipe d’Oxford et résumée par la BBC*
Équivalent proposé par le GDT 
Définition donnée par le GDT
Adulting
The practice of behaving in a way characteristic of a responsible adult, especially the accomplishment of mundane but necessary tasks


Alt-right
An ideological grouping associated with extreme conservative or reactionary viewpoints, characterized by a rejection of mainstream politics and by the use of online media to disseminate deliberately controversial content


Brexiteer
A person who is in favour of the UK withdrawing from the European Union


Chatbot
A computer program designed to simulate conversation with human users, especially over the internet
Assistant virtuel, assistant conversationnel, assistant intelligent, assistant personnel
Programme informatique conçu pour répondre aux questions qui lui sont transmises ou pour exécuter des tâches au moyen du langage naturel.  
Coulrophobia
Extreme or irrational fear of clowns
Coulrophobie
Peur exagérée et irrationnelle des clowns 
Glass cliff
Used with reference to a situation in which a woman or member of a minority group ascends to a leadership position in challenging circumstances where the risk of failure is high


Hygge
 A quality of cosiness and comfortable conviviality that engenders a feeling of contentment or well-being, regarded as a defining characteristic of Danish culture


Latinx
A person of Latin American origin or descent, used as a gender-neutral or non-binary alternative to Latino or Latina


Woke
Originally in African-American usage meaning alert to injustice in society, especially racism


*Source : http://www.bbc.com/news/uk-37995600


Notes sur quelques mots de la liste précédente :

Wikipédia nous apprend que « [l]Le préfixe coulro‑ vient du grec ancien κωλοϐαθριστής / kôlobathristếs signifiant 'acrobate qui est sur des échasses' ». Étymologie curieuse : les lettres κω équivalent en français à  / , non à cou et je ne vois pas d’où peut bien provenir le r de coulro‑. Le mot κωλοϐαθριστής est un mot composé ; la première partie est κλον, que l’on trouve dans le français côlon. Le sens premier de κλον est « membre d’homme ou d’animal ». Le mot coulrophobie est une absurdité étymologique. Cela a échappé à l'équipe du GDT*.


Quant aux équivalents proposés par le GDT pour chatbot (chatter bot), ils ne sont que des traductions littérales des synonymes anglais intelligent virtual assistant, virtual assistant et intelligent agent.


Le hygge posera un problème intéressant aux terminologues du GDT : oseront-ils accepter l’emprunt intégral du mot danois malgré sa difficulté à le prononcer en français ? Le mot se prononce [ˈhuːɡə] en anglais, [ˈhyɡ̊ə] en danois. À laquelle de leurs règles relatives à l’emprunt des formes étrangères auront-ils recours dans ce cas ? La difficulté de prononcer le mot en français sera-t-elle un facteur de rejet ?




J’écrivais l’année dernière :

On a […] pensé à une époque que le Québec, étant aux avant-postes de la francophonie, avait pour rôle de proposer au monde francophone des équivalents aux néologismes américains, ce qui avait entraîné dans les années 1970 la création d’une équipe de néologie à l’Office (pas encore québécois) de la langue française. Époque révolue.

Je me dois de tirer la même conclusion cette année. 


________

* L’Online Etymology Dictionary précise :

Ancient Greek words for "clown" were sklêro-paiktês, from paizein "to play (like a child);" or deikeliktas. Greek also had geloiastes "a jester, buffoon" (from gelao "to laugh, be merry"); there was a khleuastes "jester," but it had more of a sense of "scoffer, mocker," from khleuazo "treat with insolence." Other classical words used for theatrical clowns were related to "rustic," "peasant" (compare Latin fossor "clown," literally "laborer, digger," related to fossil). 

Coulrophobia looks suspiciously like the sort of thing idle pseudo-intellectuals invent on the internet and which every smarty-pants takes up thereafter; perhaps it is a mangling of Modern Greek klooun "clown," which is the English word borrowed into Greek.



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